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Opéra Comédie

130e anniversaire de l’Opéra Comédie

Le 1er octobre 2018 avait lieu le 130e anniversaire de l’inauguration du théâtre municipal Opéra Comédie (1er octobre 1888). 

Ce fut l'occasion pour les Archives de Montpellier de présenter des documents retraçant l’histoire du théâtre, mais aussi de faire connaître des musiciens montpelliérains et d’évoquer des événements marquants de la vie musicale montpelliéraine.

Un « bâtiment-monument » central dans l’urbanisme montpelliérain

L’histoire de l’Opéra Comédie commence en 1740, lorsque le roi Louis XV accorde par lettres patentes à Antoine Rey, promoteur, l’autorisation de construire un théâtre sur des terrains vacants à proximité de la porte de Lattes. La première salle de spectacle et de concert, élevée à la périphérie de la ville, va devenir l’instrument d’un grand projet urbanistique s’étalant du XVIIIe siècle à nos jours, remodelant l’espace public montpelliérain. Avec lui, s’enclenche le mouvement irrésistible de déplacement du centre de gravité de la ville vers le sud-est, poursuivi avec la gare et aujourd’hui le nouvel Hôtel-de-Ville.

 

La place de la Comédie, aménagée progressivement devant le théâtre, devient le nouveau cœur battant de Montpellier. D’abord étriquée, elle s’élargit avec la destruction des murailles de la Commune Clôture. En 1797, on y installe face à l’entrée du théâtre les emblématiques Trois-Grâces, qui ornaient à l’origine la fontaine de la place de la Canourgue. La reconstruction de l’édifice actuel, inauguré en 1888, lance l’haussmannisation de la place de la Comédie, dont l’alignement des façades s’organise en fonction de la perspective de l’Opéra

 

Vecteur de modernisation urbaine, il est le premier bâtiment public à bénéficier de l’électricité en raison des incendies qui l’ont frappé par deux fois, la Ville étendant aussitôt l’éclairage électrique aux rues avoisinantes. En 1986, la place de la Comédie devient le premier espace piétonnier de Montpellier, de nos jours l'un des plus importants d'Europe, mettant ainsi en valeur l’ensemble architectural. Lieu d’excellence culturelle et de célébrations populaires, comme ce fut le cas en 2012 lorsque le MHSC remporta le championnat de France de football, l’Opéra Comédie est l’un des symboles forts de la ville de Montpellier.

L’Opéra Comédie en dates

1740
1752
1755
1785
1881
1884
1888
1979
1986
1988
2010 - 2012

Premier projet du théâtre.

Le Conseil de Ville de Montpellier, sous l’impulsion du gouverneur de Languedoc, le duc de Richelieu, reprend le projet et le confie à l’architecte Philippe Mareschal.

22 décembre 1755 : Inauguration de la première salle de spectacle et de concert.

17-18 décembre 1785 : premier incendie du théâtre, reconstruction du bâtiment par les architectes Donnat et Lenoir.

6 avril 1881 : deuxième incendie du théâtre, la reconstruction de l’édifice est confiée à Joseph Cassien-Bernard, architecte parisien, élève de Charles Garnier, sur le modèle de l’Opéra de Paris.

14 juillet 1884 : pose de la première pierre du nouveau théâtre, début du chantier de l’Opéra Comédie.

1er octobre 1888 : inauguration de l’édifice actuel avec la représentation de l’opéra de Scribe, Deschamps et Meyerbeer, Les Huguenots.

1er octobre 1979 : création de l’Orchestre de Montpellier, devenu orchestre national en 1999, qui marque la renaissance du théâtre.

21 juin 1986 : inauguration de la place de la Comédie, plus grande place piétonne d’Europe.

17 décembre 1988 : inauguration du Corum, puis en 1990 de l’Opéra Berlioz qui dote Montpellier d’une salle de spectacle de rang international. Ouverture à la même époque des théâtres Jean-Vilar et de Grammont. Évolution de l’Opéra Comédie en une salle dévolue à l’art lyrique.

Octobre 2010-avril 2012 : dernier chantier de rénovation de l’Opéra Comédie.

carte postale fiche territoire comedie
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L’Opéra Comédie en images

Le théâtre et la place de la Comédie comptent parmi les sujets favoris des photographes. Voici une sélection de cartes postales du début du XXe siècle présentant le théâtre de Montpellier à la Belle Epoque.

Le théâtre avant le théâtre – la Salle de spectacle et de concert (1755-1881)

Répondant au vœu du duc de Richelieu, gouverneur de Languedoc, de voir édifier à Montpellier une salle de spectacle (pour les représentations scéniques) et de concert (pour la musique instrumentale), les consuls décident en 1753 d’en confier la construction à Philippe Mareschal, ingénieur royal et directeur des fortifications de la province. Aussi connu pour ses ouvrages militaires – les fameuses redoutes du littoral languedocien – que pour ses talents d’urbaniste – les jardins de la Fontaine à Nîmes, son projet est préféré à ceux des architectes montpelliérains Dejean et Giral. Il inscrit le théâtre dans la ville en la transformant, notamment en élargissant les voies, en comblant les fossés et en déplaçant la porte de Lattes. La vieille porte médiévale est démolie, remplacée par la grille provenant du château de la Mosson. Le jeu de ballon est déplacé également, créant ainsi un vaste parvis en connexion avec l’Esplanade. Suivant l’air du temps, Mareschal intègre dans son projet un café, un des tout premiers de Montpellier. Souhaitant créer un lieu de loisir pour les élites urbaines, le projet initial prévoyait d’y associer une salle de jeu de paume et une salle de billard.  Les difficultés financières liées à la construction de l’aqueduc de Saint-Clément font que les délais ne sont pas tenus et le théâtre est inauguré le 22 décembre 1755 avec l’opéra de Rebel et Francœur, Pyrame et Thisbé, avant que les travaux ne soient achevés.

 

Dans la nuit du 17 au 18 décembre 1785, le théâtre brûle. Les travaux de reconstruction sont confiés à Jacques Donnat et Samson-Nicolas Lenoir. Si la façade, le vestibule et la salle de concert sont conservés, les deux architectes montpelliérains modifient la grande salle de spectacle et repensent complètement les espaces en les agrandissant. Le second théâtre est inauguré le 1er octobre 1787 avec une comédie mêlée d’ariettes de Marmontel et Gretry, L’Ami de la maison. Ses abords sont réaménagés ; des voies élargies le séparent des autres bâtiments. On installe en 1797 sur le parvis la fontaine des Trois-Grâces et la place de la Comédie prend déjà la forme d’un œuf qui la caractérise.

 

 

 

 

Cette photographie, unique, due certainement à l’objectif de Georges d’Albenas (1827-1914), provient de la collection de l’érudit montpelliérain Emile Bonnet et serait datée de 1858. La qualité du tirage papier d’après un négatif sur plaque de verre permet d’apprécier tous les détails de la façade. Elle nous en apprend plus que tout autre document d’archive. La façade de Mareschal, large de 27 mètres, était divisée en trois parties, la partie centrale faisant saillie, surmontée d’un fronton triangulaire sur l’attique, dans le plus pur style du XVIIIe siècle. Elle offrait cinq portes au rez-de-chaussée, les trois portes centrales donnant sur le vestibule, la porte latérale de gauche sur la direction du théâtre, celle de droite sur le Café de l’Opéra. Les cinq fenêtres à l’étage ouvraient sur la salle de concert. Toute la décoration était groupée dans la partie centrale. Quatre pilastres ioniques encadraient les fenêtres. L’enroulement des volutes était surchargé de guirlandes, ainsi que d’un modillon zoomorphe entre les deux volutes. Trois trophées, l’un militaire, à gauche, avec un décor de faisceau de licteur et une cuirasse à l’antique, les deux autres d’instruments de musique (violon, tambour de basque, hautbois, cornemuse, etc.), couronnaient les fenêtres. Le fronton portait à l’origine les armes du duc de Richelieu. Symbole du pouvoir de l’Ancien Régime, elles furent remplacées par une horloge, seule subsistant la couronne ducale qui les surmontait. La corniche était ornée de groupes de statues qui furent, par la suite, supprimées.

 

Ce soir-là, on donnait au théâtre Haydée ou le secret de Daniel-François-Esprit Auber sur livret d’Eugène Scribe, opéra-comique en trois actes créé en 1847 à Paris et représenté chaque saison à Montpellier les années qui suivirent ; la soirée était complétée par Le bras d’Ernest, une comédie-vaudeville en un acte d’Eugène Labiche créé en 1857, et par Les Extases de M. Hochenez, comédie mêlée de couplets de Marc Michel créée en 1850. Ces œuvres furent jouées durant la saison 1857-1858, comme nous l’apprend le Journal du théâtre d’Adolphe Gilles (AMM, 9S1, p. 99).

Un théâtre à l’italienne

plan de salle opera comedie montpellier

 

La Salle de spectacle de Montpellier témoigne du développement du théâtre à l’italienne au milieu du XVIIIe siècle, l’un des tout premiers construit en France. Modèle du genre, le plan de Mareschal est même reproduit dans l’Encyclopédie de Diderot et d’Alembert. Le théâtre à l'italienne se caractérise par une salle de dimensions modestes, en forme de U, organisée autour d’un parterre et structurée en plusieurs étages de loges ou balcons, offrant au public une qualité d’écoute et visuelle. La scène à l'italienne est surélevée par rapport à la salle. Quoique transformée par Donnat et Lenoir, la salle conserve les grandes lignes tracées par Mareschal.

 

Tout au long du XIXe siècle, des améliorations sont apportées et des réparations faites à l’intérieur. En 1822, Fovis, architecte adjoint des bâtiments civils, propose de réaménager les espaces. Il envisage notamment de transformer la salle de concert en grand foyer, afin de créer un espace adapté pour accueillir le public nombreux. « Bien des personnes ne se rendent au spectacle que pour traiter des affaires de commerce » et perturbent les représentations par leurs conversations. Le théâtre a surtout besoin "d’un bon coup de peinture" pour remédier à son état de délabrement. « La couleur bleue est préférable à toutes les autres par rapport aux dames ; elle est moins crue ». Au cœur de la Restauration, le bleu est bien la couleur du moment, celle du blason aux fleurs de lys de la royauté représenté avec les armes de la Navarre au-dessus de la scène. Enfin, Fovis a l’idée d’installer un lustre en cristal monumental au centre de la salle, haut de 3,30 m. sur 1,80 m. de diamètre, garni de 36 lampes, projet validé en 1824 par le préfet Creuzé de Lesser, qui augmentera la majesté du lieu. 

 

Pour en savoir plus : 

  • Pierre Jourda, Le Théâtre à Montpellier 1755-1851, Oxford, Voltaire Foundation, 2001. 

  • Caroline Millot, « La salle de spectacle et de concert de Montpellier au Siècle des Lumières (1753-1785) : une œuvre de l’ingénieur Jacques-Philippe Mareschal », Bulletin historique de la Ville de Montpellier, n°35, 2013, p. 62-77. 

  • Jean Nougaret, Montpellier monumental, Tome 1, Paris, Monum, 2004.

couverture journal theatre de montpellier

Le Journal du Théâtre d’Adolphe Gilles (1835-1908)

Le 5 février 1908, disparaissait à l’âge de 72 ans Adolphe Achille Gilles, musicien et second violon à l’orchestre du théâtre de Montpellier. Il est l’auteur d’une série de dix-neuf volumes manuscrits, le Journal du Théâtre, décrivant par le menu la vie musicale et théâtrale dans le chef-lieu du département de l’Hérault entre 1790 et 1908. Ce document, unique en son genre, est conservé aux Archives municipales (sous-série 9 S). La collection se compose de neuf registres et de dix cahiers qui s’interrompent quelques jours avant la mort de Gilles. L’histoire du théâtre se répartit de manière très inégale sur les volumes : les premiers registres sont consacrés à 90 années, puis 10, 6, 3 et 2 ans, tandis que les derniers cahiers  couvrent entre 1902 à 1908 une seule saison chacun. Un dernier volume récapitule les listes des directeurs, chanteurs, musiciens et des créations lyriques depuis 1790. Les informations sont classées par direction ou « entreprise » théâtrale, les directeurs changeant généralement à chaque saison. On trouve le tableau de la troupe constituée pour l’année, les titres des pièces jouées, la distribution des rôles, ainsi que des événements liés à l’histoire du théâtre ou qui se sont déroulés pendant les représentations.

 

Au-delà de la richesse de son contenu, le Journal du Théâtre est exceptionnel car entièrement décoré à la gouache. Chaque page est ornée d’un liseré rouge et des motifs géométriques viennent rythmer les parties et sous-parties du récit de Gilles. Il colle dès que cela est possible les prospectus, affiches, articles de presse et parfois photographies d’artistes pour étayer son discours. Les photographies d’artistes sont rares à Montpellier. Leur présence dans la collection vient enrichir la documentation sur les représentations théâtrale et les costumes employés. On peut qualifier Gilles de très méthodique. Il numérote chaque représentation afin de pouvoir dresser des statistiques (relevé exact des artistes, nombre de fois où le théâtre provisoire a ouvert ses portes, titres des pièces joués avec le nombre de représentations, etc.). Il met en place son propre code couleur pour distinguer les types de représentation : bleu pour les représentations à moitié prix, rouge pour les représentations populaire, le drapeau français pour indiquer les représentations au bénéfice des pauvres. Le Journal du Théâtre est par conséquent une source essentielle pour la connaissance du théâtre de Montpellier dans un large XIXe siècle. Nous retrouverons Gilles à d’autres moments de l’année. En raison de sa fragilité, cet ensemble a été numérisé.

 

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